mardi 17 décembre 2013

TORSO, DON et nous


Réunis un peu par hasard à l'occasion du plus foireux des festivals de cinéma du monde, TORSO et Peeping Tom ont entretenus depuis de solides liens amicaux et néanmoins productifs. 
Et même si ce n'était pas le cas, comment passer sous silence la sortie de leur numéro 10, consacré en grande partie à Don Coscarelli, réalisateur du quadrilatère sphérique Phantasm et du film préféré des vieux rockers egyptophiles : Bubba Ho-tep
Si vous voulez savoir tout le bien que j'en pense, allez donc écouter la chronique diffusée ce mois-ci sur RGO, en attendant que l'onglet "Chronique Radio" de ce blog soit mis à jour (ce qui finira forcément par arriver un jour...)

lundi 9 décembre 2013

Objectif Cannes

Après une belle rencontre avec Dario Argento l'année dernière, Peeping Tom retourne dans la ville du cinéma, invité par les Rencontres Cinématographiques de Cannes dont le thème est cette année "le Secret". 


Pour illustrer le sujet, nous présentons mardi 10 décembre à 21h30,au Studio 13, Iron Sky, film de SF avec des nazis, drôle, politique, kitch et gonflé, dont Julien Camy vous a déjà parlé ici-même

On vous y attend, nombreux et motivés, pour découvrir la face cachée de la lune...


mercredi 20 novembre 2013

Dans l'espace, on vous entend manger du popcorn


Partons du principe que Gravity est le plus gros trip visuel grand public depuis... Star Wars.
On pourra toujours ergoter ici et là sur un scénario à tendance humano-catho, sur quelques effets et images un peu appuyées (et le foetus, tu l'as vu le foetus ?) et sur cette putain de bande son qui ravage le final, avec un morceau dont Roland Joffé n'aurait même pas voulu pour Mission... Mais là n'est pas le propos.

Ceci n'est pas une critique de film, c'est plutôt une critique de spectateur, ou une petite réflexion très subjective (mais vachement pertinente) sur ce qu'est devenu le cinéma aujourd'hui. 

Donc je mets mes lunettes 3D et je pars dans l'espace sidéral et silencieux, à peine parasité par les vannes de Clooney et la country "old school" qu'il a la bonne idée d'écouter pas trop fort dans son casque. La technologie fonctionne, je flotte avec la caméra, j'y suis et je me sens prêt à jouer le jeu jusqu'au bout, si le concept d'Alfonso Cuarón tient le coup. 

Et là : "Crunch".

"Crunch" c'est le bruit caractéristique du mangeur de popcorn. Un bruit qui peut éventuellement coller au film (Pour n'en citer qu'un, le Piranha 3D d'Alexandre Aja n'a-t-il pas été intelligemment conçu pour être consommé avec des popcorns ?), mais qui n'est ABSOLUMENT PAS compatible avec Gravity.
Parce que ce cinéma-là retrouve un principe, souvent oublié, mais qui est à la base même du spectacle cinématographique, depuis les fameux déplacements paniqués du spectateur devant L'arrivée d'un train en gare de la Ciotat : l'immersion. 
Pour que ça marche, il faut qu'on soit dedans. Tout le concept de Gravity repose sur l'alliance de la 3D et d'une caméra flottante afin de mettre le spectateur dans l'illusion de l'apesanteur.

Et "Crunch" nous rassied fermement sur notre fauteuil.
"Crunch" nous ramène dans notre pauvre salle, nous enlève nos lunettes, et réduit l'expérience du film à une prouesse technologique un peu floue lorsqu'on la regarde sans artifice. 

Je sais, des millions de spectateurs ont déjà vu Gravity et la plupart avaient du popcorn à la main ou dans leur entourage, et ça ne les a pas empêchés de décoller. Moi non plus d'ailleurs : je me suis concentré au maximum et le monsieur a fini son seau de friandises vers le milieu du film. 
Mais à une époque où, avec un bon système de projection domestique, on peut recréer dans son salon les conditions d'une immersion équivalente à celle de la salle de cinéma, il est bien dommage qu'un film qui constitue une véritable étape dans l'évolution de l'expérience du spectateur soit parasité par la pratique ancestrale du "crunch". 

Ce n'est certainement pas un hasard si, avant le film, une pub pour dissuader les jeunes de fumer (le genre de truc très efficace et pas du tout hypocrite) évoquait justement la "liberté de la jeunesse", en énumérant ses droits, dont celui-ci : "le droit d'aller au cinéma sans regarder le film". Propos illustré par un ado dans son fauteuil de cinéma en train de regarder l'écran de son portable.
Ben non !
Parce que si tu éclaires ton portable pendant la séance, tu m'empêches aussi de regarder le film. 
Si tu veux pas regarder le film, sort de la salle et va au soleil, c'est bon pour ton acné, et laisse-moi me plonger dans le silence et l'infini sidéral : c'est bon pour ma misanthropie.
Jan Jouvert


La photo qui illustre cet article n'a rien à voir avec le film. Elle vient de cet article, qui propose une solution alternative à mes petites contrariétés de spectateur : allez bouffer votre popcorn dans l'espace !

  

jeudi 14 novembre 2013

Black is back

Même si les médias d'ici passent un peu à côté de la chose, le festival BLACK MOVIE de Genève fêtera ses 15 ans du 17 au 24 janvier 2014.
Un festival audacieux, qui ne trace pas de frontière entre cinéma d'auteur et film de genre et se fait remarquer avant tout par sa programmation qui n'a peur de rien, ni de personne...
On en reparle bientôt, en attendant, profitez de l'affiche :


jeudi 17 octobre 2013

Retour à Genève avec Brian De Palma


L'année dernière, Les Cinéma du Grütli avaient invité Peeping Tom pour une programmation autour de Paul Schrader. Nous y retournons cette année du vendredi 25 au dimanche 27 octobre pour célébrer l'un des plus grands héritiers d'Hitchcock (mais pas seulement !) : Brian De Palma.
A travers 7 films (Phantom of the Paradise, Pulsions, Scarface, Blow Out, Body Double, L'Impasse et Le Bûcher des Vanités) nous tenterons de saisir quelques clés de l’œuvre d'un des maîtres du cinéma contemporain.

La programmation est visible ici.Rendez-vous à Genève !

mardi 1 octobre 2013

dimanche 29 septembre 2013

Héros torturés et salauds magnifiques




Trois de plus ! En septembre, nos amis d'Artus ont balancé Killer Kid, Les Colts de la violence et Bandidos dans les meilleures crèmeries. Trois westerns italiens de la période 66-67, considérée comme l'apogée du genre dans la bible de Jean-François Giré, Il était une fois le western européen, qui consacre une pleine page au Colts de la violence, mais se contente de résumer les deux autres.
Qu'il me soit permis ici d'inverser la tendance, pas tant par esprit de contradiction que par gout personnel. 

Car si effectivement Mille Dollari Sul Nero (si, si, c'est le titre original des Colts de la violence...) semble sur le papier diablement alléchant, il peut s’avérer avec le recul légèrement surestimé. 
Un homme revient chez lui après 12 années passées en prison pour un crime dont il est innocent. Son jeune frère, mégalomane, psychopathe, échevelé, lui a piqué sa compagne et dirige une bande de crapules sans foi ni loi avec qui il viole, tue, et s'empare de tout ce qui passe à sa portée... 
Avec sa rivalité fratricide, attisée par une mère fascinée par la violence de son cadet, ses décors baroques et ses jaillissements de cruauté, le western prend des accents shakespeariens, malheureusement affaiblis par un découpage et un montage bâclés, particulièrement flagrant dans les scènes de fusillades où les armes semblent tirer un peu au hasard, où les victimes tombent sans avoir été visées, dans la confusion la plus totale. 
Malgré ce bordel ambiant et quelques baisses de régimes, Les Colts de la Violence recèle pas mal d'atout, notamment la révélation de Gianni Garko dans le rôle de Sartana, le frère fou furieux, nettement plus charismatique qu'Anthonny Steffen qui tente l'attitude à la Eastwood (la bouche fermée et le regard qui tue) mais reste un peu trop lisse.

Les plus belles séquences du film sont dues aux femmes : celle de la mère décidant de descendre dans la rue arrêter le massacre, et surtout celle de la femme abandonnée par les deux frères dans le temple inca qui servait de repère aux pillards. Deux moments insolites, presque fantastiques, qui à eux seuls méritent la découverte.


On retrouve Anthony Steffen dans Killer Kid où il continue à se prendre pour Eastwood, mais dans un rôle plus ambigu encore, entre cynisme et duplicité, au milieu d'une révolution mexicaine annoncée dès le carton du générique qui donne le ton : on est dans le western zapatta ! 
Ne nous y trompons pas cependant, si le film a quelques résonances avec le chef d’œuvre de Damiano Damiani, El Chuncho, le ton est ici plus léger et surtout plus binaire. La corruption et les dérapages de la révolution sont certes présents, mais ils servent avant tout d'éléments déclencheurs du scénario, qui tourne essentiellement autour de la valse hésitation de son héros.
Pour alimenter ses réflexions et son trouble : un vieux révolutionnaire rebuté par la violence, un gros mexicain partagé entre l'idéal révolutionnaire et le profit, et une femme qui jouera un rôle essentiel dans les atermoiements de celui qu'on appelle Killer Kid. C'est sur ces quatre personnages que va se jouer toute la dynamique du film, chacun d'eux étant pétri de contradictions et d'hésitations, entre l'idéal et le désir, l'altruisme et l’intérêt personnel. 
Sous son apparente simplicité et malgré son ambiance lumineuse, Killer Kid développe en fait une vision plutôt pessimiste de l'humanité, entérinée par un plan final sans appel. 



Pas franchement plus optimiste, Bandidos délaisse l'aspect politique du western zappata pour se ranger dans la catégorie plus élémentaire du film de vengeance : Richard Martin, un tireur d'exception blessé et humilié par un bandit, Billy Kane, va former un jeune tireur rencontré par hasard, afin qu'un jour il aille abattre son rival...
Sur ce schéma simple et classique, Bandidos va en fait entrecroiser les destins de personnages qui échappent à la caricature. Le jeune élève (interprété par un Terry Jenkins pas forcément plus doué que Steffen mais nettement plus sobre) garde tout au long du film une aura de mystère autour de ses véritables intentions. On a beau le sentir du bon côté de la crosse, on a l'impression qu'il peut retourner sa veste à tout instant...
Mais c'est surtout la figure de Richard Martin, qui passe du statut de tireur d'élite à celui de camelot pouilleux, qui amène au film une dimension pathétique inédite. Sa douloureuse déchéance, portée par le grand acteur italien Enrico Maria Salerno, sert de fil rouge à une intrigue ténue mais rondement menée. Et surtout magistralement réalisée.


Pas étonnant quand on sait que Massimo Dalamano est aux commandes, l'homme de Mais qu'avez-vous fait à Solange ? et La Lame infernale (sorti récemment, on vous en a parlé ), et, avant ça, chef op' sur les deux premiers westerns de Sergio Leone
Bandidos est sa première réalisation de fiction et le moins qu'on puisse dire est qu'il maîtrise son affaire. C'est rythmé, ça respire, il n'y a pas un plan moche, et on a droit à quelques séquences grandioses. On retient un travelling à couper le souffle sur les restes d'une attaque de train qui a viré au carnage, et le superbe duel final, qui prend le contrepied des montées de tension statiques de Sergio Leone  : tout en mouvement et en trompe-l’œil.

Avec son casting fellinien (on y voit une collection de trognes pas piquée des hannetons), son beau générique de début et sa partition au cordeau signée Eggisto Machi (dont c'est pourtant la seule intrusion dans le western), Bandidos fait certainement partie des trésors cachés du genre.
Un western à la fois sombre et jouissif qui mérite plusieurs visions.

Les DVD :
Rien à dire côté masters : les copies sont de très bonne qualité, ce qui est d'autant plus appréciable qu'elles bénéficient tous d'une photo très soignée.
Tous les dvd proposent version originale sous-titrée et version française d'origine,ce qui, dans le cas du western italien est loin d'être négligeable : pour cause de castings internationaux et de postsynchronisation, la version française est souvent meilleure que l'italienne. Il faut ajouter à cela l'effet nostalgique des voix françaises sur tous ceux qui ont découvert ces films à leur sortie, ce type de production ayant eu uniquement droit à la v.f..
Côté bonus, outre les impayables bandes-annonces d'époque et les diaporamas, on retrouve avec plaisir l'enthousiaste Curd Ridel qui connaît son sujet sur le bout des doigts. Il décline sur chacun des disques les carrières des réalisateurs et surtout des acteurs, n'hésitant pas à s'attarder sur certains d'entre eux plus longtemps qu'ils n'apparaissent dans le film. Ce petit côté catalogue ne va pas sans quelques répétitions et aurait supporté une ou deux coupes, mais les bonus fourmillent d'anecdotes et d’apartés amusants et instructifs sur les carrières et les vies des comédiens.

Et puis, non content de replonger dans sa collection de photo-romans tirés des films en question, Curd Ridel évoque au détour d'une bio  l'actrice Nadia Cassini, qui s'affiche particulièrement accorte en couverture du Playboy italien.
Enfin, il convient de bien regarder le bonus des Colts de la violence jusqu'au bout pour profiter d'une petite surprise qui ravira les véritables amoureux du western italien.

          

jeudi 12 septembre 2013

Le Peeping Tom nouveau, en octobre...

En exclusivité, la page 34 du prochain Peeping Tom consacré aux "enfants d'Hitchcock", avec une interview de Dario Argento et plein de bonnes choses...


jeudi 15 août 2013

Salades d'automates


Découvrir la saga Puppet Master après coup est une expérience troublante.
Adoptée massivement par une génération nourrie aux vidéo-clubs de quartier au tournant des années 80/90, la franchise produite par Charles Band (le "Roger Corman des années 90") voit ses trois premiers épisodes débarquer enfin en édition française chez Artus. C'est l'occasion pour ceux qui, comme moi, sont passés à côté, de combler une lacune et, peut-être aussi, de prendre conscience de la bascule définitive qui s'opère à la fin des années 80 pour un certain cinéma de genre.
 
Charles Band officie depuis les années 70 dans la production cinématographique, et le moins qu'on puisse dire et qu'il ne vise pas les sélections cannoises. Fantastique, SF et érotisme irriguent une filmographie dont surnagent peu de titres jusqu'en 1985, année où Charles Band produit coup sur coup Future Cop qui deviendra lui aussi l'objet d'un petit culte chez les mangeurs de VHS, et Re-Animator de Stuart Gordon, relecture de Frankenstein et pierre angulaire du gore dont le mélange comico-sanglant reste aujourd'hui d'une rare efficacité.
Mais ce sont deux autres de ses productions qui constituent la matrice de Puppet Master : d'un côté Tourist Trap, second film signé en 79 par un réalisateur fétichiste, ironique et pas très sain nommé David Schmoeller, et Dolls, du réalisateur de Re-Animator, qui conforte Charles Band dans l'idée que les petits jouets malfaisants sont rentables.
Il engage donc David Schmoeller pour mettre en images un scénario dans la lignée de Dolls. Même si Charles Band revendique depuis toujours la paternité de la saga, il semble bien que Schmoeller ait quelques responsabilités dans la naissance du concept Puppet Master. A savoir des marionnettes autonomes, pour ne pas dire vivantes, animées de pulsions meurtrières et vengeresses, dont on comprendra les origines et les motivations au fur et à mesure des épisodes de la saga.



Car, paradoxalement, le film fondateur de 1989, tourné pour le cinéma et sorti finalement directement en vidéo au nom d'un réalisme commercial très inspiré, est certainement le plus faible de cette première trilogie. Il n'est d'ailleurs pas certain que l'immense succès en réseau de vente et location aurait connu un équivalent en salle.
Ce premier opus est assez bavard, manque cruellement d'action, et souffre surtout d'une interprétation mollassonne dans la plupart des rôles principaux. C'est d'autant plus regrettable qu'on se faisait une joie de retrouver, dans le rôle du gentil "beau gosse" qui sert de héros au film , Paul Le Mat, l'homme qui conduit le coupé Ford jaune dans American Graffiti : certes, il garde une certaine allure malgré quelques kilos et années supplémentaires, mais s'avère aussi expressif et émouvant qu'un concombre au yahourt... A l'inverse, Irene Miracle, plongeuse en eaux troubles dans Inferno de Dario Argento, en fait des caisses dans son rôle d'extra-lucide légèrement portée sur la bouteille, ce qui, a tout prendre, met un peu d'animation dans l'équipe d'amateurs de phénomènes paranormaux regroupés dans l'hôtel de Bodega Bay où sévissent les marionnettes.
Paul Le Mat, avec cravate mais sans sa Ford...
Ni les quelques "plans nichons" obligatoires, ni les marionnettes psychopathes (frôlant souvent le ridicule) ne sauvent un film qui a sacrément mal vieilli. Malgré la belle séquence de la "pièce blanche" dont est extraite la photo en tête de cet article, ce premier volet ne donne qu'une envie : revoir Tourist Trap pour vérifier qu'il s'agit bien du même David Schmoeller derrière la caméra.



Ça s'améliore nettement avec le second opus, construit pourtant sur un schéma similaire au premier (cette fois, les télépathes et extra-lucides sont remplacés par des agents du gouvernement spécialisés dans le paranormal, deux ans avant X-Files...), mais qui répare à peu près toutes les erreurs de son prédécesseur.

Entre le docteur Frankenstein et L'homme invisible : André Toulon
Si le casting reste encore un peu approximatif, ça n'a plus guère d'importance : les marionnettes prennent la vedette ! L'animation et les trucages sont mieux gérés (le réalisateur de ce second opus est le responsable effets spéciaux du premier), les séquences de meurtre sont plus originales et plus abouties, le rythme plus enlevé... Le scénario est encore un peu bâclé, mais la bonne idée est de ressusciter André Toulon, créateur des marionnettes qu'on voyait mourir abattu par les nazis au début du premier opus. Ce n'est pas seulement son attitude, clairement inspirée par L'homme invisible de James Whale (un mélange de méchanceté paranoïaque et de sentiments pathétiques), qui relève le film. Sa présence spectrale et son rapport affectif à ses créatures apportent une cohérence à ce mélange ludique et horrifique qui fait tout le sel de la saga. Puppet Master II s'affirme ainsi comme un bon produit DTV, typique de cette période où la distribution cinématographique ne laisse plus guère de place en salle pour les productions fauchées du cinéma d'exploitation.

L'inévitable "plan nichons" : ici Charlie Spradling
Dans la lignée de ce deuxième succès, Charles Band monte à toute vitesse Puppet Master III en convoquant celui qui ne tarderait pas à devenir le pape de l'horreur homo-érotique, David DeCoteau. Bien lui en a pris : le réalisateur de Creepozoids réussit à merveille cet épisode rétrospectif qui montre comment André Toulon, rendu veuf par les débordements criminels de la Gestapo, transformera ses marionnettes nourricières en armada sanglante. Une reconstitution sommaire mais efficace de l'Allemagne nazie, un scénario enfin soigné et parfaitement cohérent (même s'il nourrit quelques contradictions avec les volets précédents) et, surtout, une interprétation crédible au service de personnages nettement plus étoffés font de La Revanche de Toulon une réussite totale. Le spectateur, plus ou moins familiarisé avec les marionnettes, découvre les origines de certaines d'entre elles, notamment Blade, l'automate à tête de mort qui joue de la lame et du crochet, et surtout Leeches, construite d'après les traits de l'épouse d'André Toulon, étrange pantin qui transmet des sangsues par la bouche, dans la droite lignée de Parasite Murders de David Cronenberg...

Six-shooters, AKA "Spider Puppet"
Mais la vedette de cet épisode est sans conteste Six-shooters, le cow-boy à six bras, qui tue du nazi en duel et grimpe aux murs avec l'aisance d'une araignée. Ajoutez à cela les mandales et les soupirs de Pinhead (la marionnette à gros bras et petite tête), deux scènes orgiaques avec un dignitaire nazi amateur de grosses poitrines, l'affrontement de deux figures de la série B, Guy Rolfe et Richard Lynch, et, pour parachever le tout un final réellement démoniaque, et vous obtenez un cas unique dans l'histoire du cinéma : la saga dont le meilleur opus est le troisième !

Affrontement au sommet entre Guy Rolfe (à gauche)...
...et Richard Lynch
Les DVD :
Tout d'abord, signalons qu'Artus propose chaque DVD au tarif de 8,90€ avec un forfait à 22€ pour les trois d'un coup : une politique tarifaire exemplaire dont feraient bien de s'inspirer quelques gros éditeurs... Tirés de copies en très bon état, les masters sont d'excellente facture, malgré l'image sombre du premier volet certainement d'origine. Rien à redire côté son, sinon que la diction des acteurs des V.F. a ce côté bien ringard des doublages d'époque : ça peut avoir son charme... Chaque DVD propose un diaporama d'affiches et de photos des films.
Côté bonus, c'est Francis Barbier (membre actif du site de référence du cinéma fantastique sur la toile : DevilDead) qui s'y colle pour, 30 à 40 minutes par DVD d'infos précieuses sur tout ce qui entoure ces trois films et bien au-delà. A travers la genèse et les tournages, les carrières des personnes impliquées dans la production et la réalisation de la saga, les spécificités de chacun des épisodes, les incohérences de l'un à l'autre et toute une floppée d'anecdotes, ses commentaires permettent de mieux comprendre les enjeux et conséquences de ce type de production. 
Comme il le conseille lui-même, on visionnera chaque bonus APRES avoir vu le film auquel il se rapporte, même si les retournements de scénario ne sont pas le fort de cette saga.
Au final, 1h30 de mise en perspective par un amateur très éclairé qui permettent de mieux digérer la trilogie. 
De toutes façons, un type qui pioche des trésors de bandes originales dans sa collection de vinyles a droit à toute notre considération...


mardi 23 juillet 2013

Léolo le héros

On serait bien tenté de parler de chef d’œuvre si Jean-Claude Lauzon avait eu le temps de construire une œuvre. Mort prématurément dans un accident d'avion après un court et deux longs métrages, le réalisateur aura tout de même réussi à placer son dernier opus parmi les 100 meilleurs films de tous les temps selon le Time Magazine
Certes, ce genre de classement, subjectif et contextuel, ne veut pas forcément dire grand chose, mais une chose est sûre : si nous fûmes peut nombreux à voir Léolo lors de sa sortie en salle, en 1992, il fait partie de ces films qui laissent un souvenir indélébile, une expérience de cinéma physique, sensible et sensuelle. 

Construit à partir d'un premier roman célébrissime au Québec (et un tout petit peu en France) : La Vallée des avalés, dont il garde essentiellement l'esprit (le livre est physiquement présent dans le film et sert aussi bien à stimuler l'imagination du héros qu'à caler un pied de table...), le scénario est surtout nourri de souvenirs de l'enfance du réalisateur dans un quartier très pauvre de Montréal. Léolo est le cadet d'une famille de quatre enfants. Son père est fou, ses deux sœurs aussi, à des degrés divers, son grand frère est un peu simplet. Seule sa mère semble équilibrée et son corps déborde d'amour familial (Ginette Reno, magnifique, chanteuse et actrice montréalaise qui affiche une bonne cinquantaine d'albums, mais aussi quelques séries québecoises redoutables...)  
Mais la normalité n'existe pas pour Léolo, pas dans son monde... 
Partagé entre la crudité souvent terrible de sa maison, de son quartier, et une imagination qui l'embarque aux frontières du sublime, Léo Lauzon (auto-rebaptisé Léolo Lozone depuis qu'il a décidé d'être italien) est un enfant poète, amoureux, extra-lucide et ultra-sensible.
Capable aussi bien de tentative de meurtre sur son grand-père que de déclarer sa flamme en silence à sa voisine Bianca, Léolo rêve. Et nous avec.

Léolo observe Bianca
Peu soucieux de chronologie, ni de psychologie, le réalisateur réussit à n'avoir pas d'âge, à regarder l'enfant qu'il était de l'intérieur, à retrouver cette sensibilité écorchée vive que nous perdons normalement à l'âge adulte. La belle voix off de l'acteur Gilbert Sicotte relaie les scènes de l'enfance de Léolo en apportant une dimension poétique mais jamais décorative.
Cousin canadien du Toto le héros de Jaco Van Dormael, ou des quatre filles de La vie ne me fait pas peur de Noémie Lvovsky, Léolo connaît un destin plus tragique, plus fulgurant, mais profondément marquant. Probablement parce que Jean-Claude Lauzon transforme notre regard tout au long du film. Comme lors de cette plongée de Léolo dans les eaux glauques, pour ramener les hameçons perdus des pêcheurs, au milieu des objets rouillées qui transforment le fleuve en décharge publique. Dans cet environnement sale, dangereux, oppressant, le garçon nage, cherche et trouve, en plus des hameçons, une dimension fantastique et mystérieuse de la réalité, qu'il nous permet de toucher du doigt par la magie de l'immersion cinématographique...

Léolo se cultive sur le dos de son frère



Le DVD :
Bonne copie, avec de très rares défauts d'image, très fidèle à la photo granuleuse, à la fois sombre et chaleureuse de Guy Duffaux.
Le son est impeccable,
Il semblerait qu'une partie bonus ait été envisagée puis abandonnée par Artus Films pour des raisons sur lesquelles l'éditeur ne s'est pas étendu. On peut le regretter d'un côté, le film faisant l'objet d'un culte et le réalisateur n'étant plus là pour jeter quelques lumières sur la genèse de son œuvre.
On peut aussi s'en réjouir : Léolo n'a pas franchement besoin d'explication, d'analyse, et encore moins de révélations sur ses secrets de fabrication. Réjean Ducharme, auteur de La Vallée des Avalés, a choisi de ne pas donner d'interview et de rester dans l'anonymat le plus total. Il est assez cohérent que le film qu'il a inspiré reste nu lui aussi, autonome, et garde cette aura de mystère, qui est justement au cœur de la fascination qu'exerce Léolo... Léolo Lozone  !


jeudi 18 juillet 2013

Rockyrama tente le grand saut

Il y a un peu plus d'un an, nous clamions ici tout le bien que nous pensions de Rockyrama, pavé "rétrojouissif", que nous ne nous décidons toujours pas à appeler un Mook (Magazine+Book... Pourquoi pas un Boozine tant que tu y es ?)
Lorsque notre collègue de The End annonça la prolongation dudit objet en trimestriel, donc en véritable magazine, un mélange de curiosité et de craintes se profila à l'horizon.

 

Après acquisition du premier numéro, ce sont malheureusement les craintes qui l'emportent...
Si l'on retrouve avec plaisir l'esthétique et la composition qui faisaient du gros volume un bel objet, on se casse un peu les dents sur le rédactionnel qui semble tourner en rond ou pire, se perdre en route.
- Quelques lignes (4 pages en gros caractères) pour évoquer une double lecture de Running Man : Schwarzerie bourrée de testostérone, mais aussi critique de la société annonçant la télé réalité. Outre le fait que le scoop est un peu éventé, on aurait peut-être aimé un peu plus de détail pour étayer le propos.
- Un dossier sur Mad Max qui fait regretter Starfix.
- Un article pour dire qu'Alien, quand-même c'est vachement bien.
- Un pour évoquer l'histoire de ce chef-d'oeuvre méconnu : La Planète des singes.
- Un autre pour dire que Tarantino c'est Dieu*...
A moins que ce ne soit Rick James... Ou Dr Dre...Car la partie musicale, proportionnellement plus développée dans ce numéro 1, est aussi celle qui offre les articles les plus intéressants.Notamment un parallèle entre la culture hippie californienne des sixities et le rock américain dit "alternatif" des années 90, rassemblés diaboliquement autour de la maison où Manson et sa secte perpétuèrent le massacre, entre autres, de Sharon Tate.
Le télescopage des deux époques, un peu forcé parfois, a au moins le mérite de sortir des sentiers battus, d'approcher la pop culture par un angle inédit, avec une audace qui fait défaut au reste du magazine.


Mais au-delà d'une déception toute subjective, on peut nourrir quelques inquiétudes pour l'avenir du titre qui perd aussi un peu son identité, notamment lorsqu'il évoque des œuvres ou des groupes contemporains (le groupe Chateau Marmont, eux aussi nostalgiques des années 80, mais avec la bonne attitude branchouille d'aujourd'hui).
Bref, sans vouloir jouer les oiseaux de mauvais augure, ça va être compliqué de tenir sa place en kiosque avec une ligne éditoriale aussi vague.
Et si on se trompe... et bien tant mieux pour Rocky Rama !


* Quelques pages plus loin, Moïssakis refait d'ailleurs le coup de Tarantino sur Top Gun, en tentant une lecture "gay cuir" de Commando...

jeudi 11 juillet 2013

L'émerveillement retrouvé

Même si le catalogue d'Artus Films est une véritable malle aux trésors du cinéma de genre, un cabinet des curiosités du 7ème art, l'éditeur pratique rarement l'édition "collector". 
La sortie, dans la triplette de juillet, de la version "UFA" des Aventures Fantastiques du Baron de Munchhausen constitue donc un double évènement. Pour l'occasion, Artus nous propose un double DVD, emballé dans un sur-boîtier en carton et agrémenté d'un joli livret de 8 pages, comprenant le synopsis détaillé et la distribution du film illustrés de photos et de dessins d'époque. 
Mais c'est surtout le film lui-même, dans sa version de 110 minutes, qui vient combler un manque dans l'histoire du cinéma fantastique et d'aventures. 
Il permet déjà d'éliminer deux ou trois idées reçues, la première étant que le film, commandé par le régime nazi en 42, serait un instrument de propagande ou, tout du moins, récipiendaire des idées nauséabondes de l'Allemagne hitlérienne. 
Le récit des aventures du Baron de Munchhausen a beau être une des plus belles pièces de la culture germanique, c'est avant tout l'histoire d'un personnage libertaire, pour ne pas dire subversif, résistant à toute autorité, réfractaire aux religions, et prônant un hédonisme de tous les instants, aussi bien en ce qui concerne le vin et la bonne chaire que les femmes de tous âges et de toutes conditions qui succombent une à une à son charme. Particulièrement dans cette version qui assume un libertinage constant et s’agrémente de quelques plans particulièrement osés pour l'époque (des femmes au bain, seins nus, dans le harem du Sultan de Turquie !)

Turkish délices...

Deuxième idée reçue : ce film daté de Josef Von Baky serait moins bien que la version de Terry Gilliam, sortie en 88. La comparaison est stérile, pour ne pas dire stupide, puisque le réalisateur de Brazil revendique lui-même l'influence de cette ambitieuse version allemande. La filiation semble évidente au vu des trucages artisanaux mais particulièrement inventifs qui abondent dans le film : transparences, accélérés, incrustations d'images, effets d'optique, apparitions/disparitions... On est dans la continuité des fééries de Méliès et des bricolages d'Harryhausen, chers au coeur de Gilliam qui n'a jamais caché son aversion pour le tout numérique et, particulièrement dans son Munchhausen, a tenté de retrouver cette magie du trucage primitif. 

Le Baron drague, même sur la Lune...
Troisième idée battue en brèche : à l'instar du Don Quichotte de Cervantès, Munchhausen n'est pas un récit destiné uniquement aux enfants. Outre l'érotisme latent et les idées progressistes déjà évoquées, le parcours du personnage  interroge quelques points essentiels de la condition humaine, notamment sur la question du vieillissement et sur la frontière qui sépare l'imaginaire flamboyant d'un réalisme forcément moins glorieux. Malgré un démarrage un peu bavard et quelques trous dans le récit, cette version réussit à merveille le mélange de légèreté et de profondeur. Quelques scènes restent d'ailleurs particulièrement émouvantes, comme la mort de Kuchenreutter, coursier et ami fidèle du Baron, et le geste d'amour final de ce dernier envers son épouse. 
Avec ses couleurs douces dues au procédé très spécifique  "Agfacolor", son casting et son budget colossaux pour l'époque, et sa fantaisie intemporelle, Les Aventures Fantastiques du Baron de Munchhausen s'avère aujourd'hui une œuvre essentielle de l'imaginaire fantastique à l'européenne, ô combien différente des superproductions américaines.

Escapade amoureuse en décors naturels, à Venise

Les DVD :
Le deuxième DVD est entièrement réservé au documentaire Un mythe en Agfacolor, 1h15 consacrées à la naissance du procédé et à son application dans le cinéma allemand. Plein d'enseignement historiques et techniques, quoiqu'austère dans sa forme.
A la suite du film, sur le premier disque, le Docteur "Artus Bonus", plus connu sous son nom véritable d'Alain Petit, sévit une fois encore avec un enthousiasme communicatif. Il reconstitue le contexte qui a vu naître ce projet, s'attarde sur les noms essentiels du générique, mais il évoque aussi les autres adaptation et, surtout, les différentes versions accessibles selon les époques, fantasmant sur une hypothétique copie de 2h15 dont l'existence est, pour l'heure, difficile à prouver. 
"De toutes façons, quand on est en présence d'un film comme ça, la moindre minute retrouvée, c'est déjà un trésor !" conclut-il avec une émotion palpable.
 

Alain Petit exhibe l'un de ses trésors, illustré par Gustave Doré !!!



mardi 2 juillet 2013

Grosse cylindrée et combinaison cuir

Ca ressemble plus à un fantasme de cinéphile déviant qu'à un vrai film. 
Jack Cardiff, l'un des plus éblouissants chef opérateur de l'histoire du cinéma, réalise en 68 son onzième long métrage (quand-même !) en tant que réalisateur, adapté de l'écrivain français érotico-surréaliste André Pieyre de Mandiargues. Si l'histoire en est simplissime (une femme est partagée entre deux hommes : l'un gentil et propret qu'elle a épousé, l'autre, viril et un peu propret aussi, qui est son amant), la forme en est en revanche libre et profondément originale. 

L'action (si l'on peut employer ce mot) part d'un rêve étrange sur fond de cirque. La jeune et belle Rebecca s'éveille dans le noir, troublée. Elle décide alors de quitter discrètement son mari aux premières heures du matin, pour enfourcher son Harley-Davidson Electra Glide et parcourir les kilomètres qui séparent la France de la Suisse afin d'y retrouver son amant. 
Entre flash-back et séquences oniriques reliés par une voix off exprimant les souvenirs, les doutes et les interrogations de l'héroïne, La Motocyclette a tout du "road-trip-movie", une petite année avant le film qui allait définitivement installer le genre : Easy Rider
Bien sûr, ni le propos ni le décor ne sont les mêmes, mais le voyage de Cardiff, s'il n'est pas exempt de défauts, fait preuve d'une audace formelle qui force l'admiration et l'impose comme une des matrices du genre. Dès l'ouverture, la volonté de prendre le spectateur à rebours de ses habitudes linéaires est manifeste. Usant de différents effets de filtres, de transparences, de violents contrastes de couleurs, de cadrages audacieux et de compositions inattendues, Jack Cardiff ne se pose pas seulement en esthète mais s'applique à construire une ambiance sensuelle et sulfureuse hors des sentiers battus. Outre le fantasme circassien qui ouvre le film, on retiendra une scène d'amour dans l'obscurité et surtout cette séquence où les deux amants, submergés par le désir dans une forêt enneigée, s'allongent sur un tas de bûches. 
 
Certes, la valse hésitation de Rebecca est un peu désuète aujourd'hui et sa relation gentiment sado-maso avec un Delon fumeur de pipe portant un joli gilet tricoté-main a perdu son parfum de scandale. Mais cette volonté de remettre en cause les valeurs traditionnelles de façon un peu lourde est largement compensée par le charme du film et surtout les surprises qui jalonnent ce trip. Particulièrement habile à caractériser ses personnages par les décors qui les entourent (l'école et son tableau noir pour le mari, la librairie pour la jeune fille, la grande fenêtre ajourée pour l'amant...), Cardiff maîtrise le va-et-vient temporel et délivre les maigres informations de l'intrigue avec un judicieux sens du timing.Au final, ce sont surtout les mimiques extatiques et les sourires forcés de Marianne Faithfull, abondamment filmée en combinaison de cuir noir, les cheveux aux vents sur sa grosse cylindrée, qui nous semblent un peu longuets, 45 ans après.
Ne gâchons pas notre plaisir pour autant : La Motocyclette est une hallucinante embardée du cinéma européen, le film d'un artisan libertaire et obsessionnel qui, aussi bien comme chef op' qu'en tant que réalisateur, a su utiliser le cinéma comme un terrain d'expérimentations et la caméra comme une machine à rêver.


Le DVD :
C'est une excellente copie qui nous est proposée ici, dont le transfert respecte les partis pris esthétiques du film. La bande son impeccable permet d'apprécier entre autres la musique originale de Les Reed.
Outre un abondant diaporama et la bande-annonce du film, nous avons droit au laïus de l'incontournable Alain Petit, toujours aussi érudit en ce qui concerne le générique et enthousiaste sur les écarts de conduite d'Alain Delon, mais peu disert sur l'originalité de fond et de forme de La Motocyclette. Cela dit, c'est juste pour chipoter : Artus Films vient encore d'ajouter une curiosité incunable à son catalogue déjà particulièrement roboratif !
 

mardi 25 juin 2013

Les objets du culte (4)


Ce n'est pas le meilleur film de Romero. Quant à Stephen King, au scénario, il se contente de respecter à la lettre l'esprit des récits EC Comics type "Tales from the Crypt". 

N'empêche, si Creepshow reste un exercice de style typique des années 80  (dans le même esprit, Spielberg produira Twilight Zone sous l'égide de la Warner l'année suivante), il remplit le cahier des charges, rend hommage aux BD d'horreurs des années 50 et offre quelques grands moments entre franche rigolade et délicieux frissons : un beau gâteau de fête des pères, une invasion de cafards propre à réveiller les pires phobies urbaines et une prestation de Stephen King en benêt redneck le temps d'un sketch, très loin de l'Actor's Studio, mais jubilatoire quand même.

En fait, le vrai trésor de Creepshow, c'est la BD qui l'accompagne, une mise en dessins du film, histoire de boucler la boucle. En général, les produits dérivés et autres "novélisations" sont bâclés, confiés à des tâcherons à qui on ne demande surtout pas d'être inspirés.
Idée de génie, l'adaptation est confiée à Bernie Wrightson, co-auteur de La Créature des marais, qui illustrera plus tard le classique Frankenstein dans une version sublime. Au vu des planches ébouriffantes de Wrightson, le livre confirme cette idée : le cinéma c'est bien, mais le charme de ces comics destinés à pervertir la jeunesse américaine est définitivement inadaptable... 

 

Rareté : Épuisé peu après sa sortie chez Albin Michel en 1983, l'album a été réédité en 2012 chez Soleil Productions. Merci à eux, même si on préfère quand même la couverture originale reproduite en tête d'article...