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lundi 15 octobre 2012

Se mange froid

Voilà un titre tardif du gothique italien qui met en vedette une Barbara Steele saturée de cinéma d'horreur pour le conte d'une coproduction italo-américaine : à priori ça sent le produit commercial sans âme.
Sauf que, si le film est signé à l'époque par le producteur Ralph Zucker, il est en réalité la première réalisation de Massimo Pupillo (Vierges pour le bourreau) et le moins qu'on puisse dire est qu'il soigne son affaire, malgré son manque d’intérêt pour le genre que nous révèle Alain Petit dans l'indispensable bonus du dvd.
Le film de "vengeance d'outre-tombe" est quasiment un sous genre qu'on pourrait croire inventé pour Barbara Steele (Le Masque du démon, Les Amants d'outre-tombe, ce Cimetière des morts-vivants...) et qui a, en tous cas, pullulé dans le cinéma d'horreur italien. Il a l'avantage de se dérouler la plupart du temps dans un décor unique et de jouer sur une série de codes narratifs très efficaces, combinant avec plus ou moins de bonheur énigme policière et maison hantée.
Le scénario est ici particulièrement travaillé et, si l'histoire n'est pas d'une grande originalité, son point de départ accroche immédiatement le spectateur : un notaire est convoqué par le propriétaire d'une vieille demeure maudite pour finaliser son testament. Lorsqu'il arrive sur les lieux, il apprend que le maître des lieux... est mort depuis un an.
Le site américain de référence Imdb crédite l'histoire d'origine à Edgar Allan Poe, information erronée et démentie dans le bonus, mais qui s'explique peut-être par les scènes où l'on entend, en voix-off, le héros du film qui pense, effet qui rappelle le récit d'horreur à la première personne typique de Poe.


Ici, l'accent est mis sur les accessoires, quelques effets spéciaux et une bande sonore omniprésente pour faire grimper le suspense. Les portes grincent ou claquent, les horloges rythment bruyamment le temps, le tonnerre gronde, les arbres s'agitent et les statues portent les stigmates du mal qui rode. On trouve, derrière des vitrines, des cranes de squelettes, des bras momifiés, des cœurs dans du formol... Sans compter la menace de peste qui permettra, à terme, quelques maquillages purulents fort sympathiques.
Certes, la réalisation n'y va pas de main morte et l'insistance sur les effets sonores tourne parfois à la caricature. Mais, mine de rien, Le Cimetière des morts-vivants anticipe quelques idées du giallo (la comptine infantile chère à Dario Argento) et l'on pense même parfois à Evil Dead (la nature qui semble littéralement agresser la pauvre servante du château, et surtout la voix du mort sur le phonographe à rouleau, ancêtre du magnétophone possédé de Sam Raimi). 
Sur une réalisation beaucoup plus sérieuse et moins pop que celle de Vierges pour le bourreau, Pupillo joue quand-même la carte de l'érotisme en faisant tout son possible pour déshabiller ses deux actrices principales :  Barbara Steele, habilement immergée dans une baignoire, ou couvrant son amant dans une scène de lit, certes soft, mais durant laquelle elle se mord le bras avec sensualité. Quant à l'inconnue Mirella Maravidi, elle se laisse surprendre nue par le fantôme de son père (qui sera le seul à la voir, faut pas rêver non plus !) ou se change derrière un drap suggestif, après s'être vautrée dans la boue au bord du lac.  Bénéficiant d'un très beau noir et blanc signé Carlo Di Palma (chef op' de Blow-Up d'Antonioni et d'une tripotée de Woody Allen, quand-même !) et d'une bande originale tout en finesse d'Aldo Piga, Le Cimetière des Morts Vivants est un film certes daté, mais qui se découvre ou se revoit avec plaisir.
Barbara au bain

Mirella Maravidi enfile un soutien-gorge anachronique (l'action se déroule en 1911) mais sexy tout de même


Le DVD :
La copie et le master sont impeccables, le film bénéficie, en plus de sa v.o. obligatoire, d'une version française honorable. 
Artus Films a étoffé ses bonus de deux scènes supplémentaires issues de la version américaine du film, apparemment plus violente (on a même droit à un effet gore de chute de viscères plutôt inattendu) et moins explicative. 
C'est ce qu'explique l'intarissable Alain Petit, dont les anecdotes sur la mise en route du projet permettent de comprendre les logiques et les enjeux de la production d'époque. Mais ce sont vraiment ses apartés  à propos des aléas la carrière de Barbara Steele, d'un péplum fantastique ou d'un western jamais sorti en France, qui aiguisent l'appétit et laissent à penser qu'il reste encore beaucoup de cinéma de genre à aller ressusciter. A bon éditeur...

vendredi 8 juin 2012

Romantisme gothique

De la dernière fournée DVD d'Artus films, s'il est un film qui mérite de trôner au sommet de la collection "Les chefs d’œuvre du gothique", c'est bien L'Effroyable secret du docteur Hichcock de Riccardo Freda.
On le sait, le cinéma de genre italien est en pleine réévaluation depuis une dizaine d'années, ce qui permet de découvrir non seulement quelques vrais bijoux mais carrément des pans entiers d'expérimentations, de fétichisme, d'hallucinations cinématographiques... Cette pêche aux trésors ne va pas sans quelques abus, et, après quelques décennies de mépris, on assiste  à un délire italianophile qui porte aux nues tout ce qui a été produit entre 1960 et, disons, 1986* dans le cinéma de genre transalpin. Difficile, du coup, de faire son miel dans la profusion de films qui ressurgissent aujourd'hui, mais, heureusement, il y a des évidences : L'Effroyable secret... en fait partie.


Avant tout pour sa beauté plastique, au service d'une histoire d'un romantisme morbide assumé qui rappelle les plus belles pages du roman gothique anglais. Les décors et la photo, à faire pâlir la Hammer Films, ne constituent pas seulement un plaisir esthétique, ils conditionnent totalement un spectateur aussi prisonnier de la demeure du docteur, que la nouvelle épouse de celui-ci, incarnée par la reine Barbara Steele. 



Si l''intrigue s'inscrit dans l'héritage de Rebecca d'Hitchcock et du Château du Dragon de Mankiewicz, on sent bien que Riccardo Freda s'intéresse plus à la mélancolie qu'au suspense. Le professeur Hichcock a inventé un sérum censé maintenir les moribonds en vie. La première partie développe tout un rituel dans lequel il injecte des doses à son épouse qui, malgré (ou à cause) des soins prodigués, finira par succomber. Freda ralentit le temps, s'attarde sur la fascination silencieuse du professeur pour son épouse et fait d'une banale scène d'enterrement sous la pluie une séquence des plus poignantes.



Pas ennemi de l'ellipse temporelle pour autant, le réalisateur fait alors un bond de 12 ans, lorsque le veuf, après s'être éloigné de sa demeure, y revient avec sa nouvelle épouse. A partir de là, le film n'est plus qu'une lente poursuite amoureuse de Barbara Steele qui déambule dans les couloirs un chandelier à la main, s'accroche aux ronces dans une nuisette blanche vaporeuse, écarquille les yeux sous les éclairs et s'évanouit à tout de bras sur les tapis épais du manoir. 
Plus encore que dans Le Spectre du professeur Hichcock, réalisé l'année d'après (et disponible également chez Artus), Riccardo Freda délaisse l'efficacité au profit d'une quête perpétuelle de la beauté. Bien sur, il faut entrer dans le faux-rythme du film, mais le jeu en vaut largement l'éclairage à la chandelle !



Le DVD :
Comme pour Vierges pour le bourreau, la copie est particulièrement belle, ce qui, évidemment, rend hommage à l'image éblouissante signée Raffaele Masciocchi. Le son est clair et le transfert très équilibré.
En revanche, côté bonus, on reste un peu frustré par les 20 minutes accordées à Gérard Lenne sur le film. S'il connait son affaire, le critique manque singulièrement d'enthousiasme et d'inspiration face à la caméra. Et, surtout, il rate un peu le coche lorsqu'il dérive de la fascination morbide du professeur Hichcock vers un historique de la nécrophilie au cinéma qui s'avère carrément léger. C'est d'autant plus dommage que Gérard Lenne fut un ardent défenseur du cinéma fantastique dans la presse cinéma, à une époque où l'exercice était nettement moins prisé qu'aujourd'hui.
Reste un joli diaporama et quelques bandes-annonces réjouissantes.

  


* 1986 : année de sortie de Bloody Bird de Michele Soavi, choix tout à fait subjectif et arbitraire.