dimanche 30 décembre 2012

"The Ecstasy of Films" sur les chapeaux de roue


Alors qu'on annonce la fin imminente des supports physiques et la mort des boutiques culturelles, l'arrivée d'un nouvel éditeur de DVD indépendant, qui plus est spécialisé dans le cinéma de genre, est une excellente nouvelle.
Saluons donc The Ecstasy of Films, belle enseigne derrière laquelle se cache l'équipe des Films de la Gorgonne et de l'émission Culture prohibée, qui ouvre les hostilités avec un premier titre La Lame Infernale. A suivre dans la foulée : La Guerre des gangs et Torso, soit pour démarrer trois films italiens des années 70-80 inédits en France, qui placent clairement The Ecstasy of films dans l'héritage du regretté Néo Publishing. Lucio Fulci, Sergio Martino, et donc pour démarrer Massimo Dallamano, réalisateur nettement moins culte que les deux autres, certainement en raison d'une carrière et d'une filmographie assez courtes d'où émerge cependant Mais qu'avez-vous fait à Solange ? giallo gonflé et troublant dont on retrouve le parfum ambigu dans La Lame infernale
Le film démarre par la découverte d'une adolescente pendue dans son studio. La police croit d'abord au suicide, puis comprend que la jeune fille a été assassinée. Ce n'est que le début d'une suite de révélations dans une affaire particulièrement douloureuse suivie par un policier tenace est une procureur de la république intègre...
Si La Lame infernale garde du giallo les crimes à l'arme blanche, le tueur masqué (ici "casqué") et l'érotisme pervers, le film se situe aussi du côté du "poliziottesco" musclé des années 70, plus tourné vers l'action et interrogeant les rapports tendus entre l'appareil juridique et les méthodes policières. La Lame infernale s'intitule d'ailleurs en italien La Poizia Chiede Aiuto, ("La police a besoin d'aide") titre qui l'éloigne un peu plus du giallo. Mais c'est justement dans ce va-et-vient entre deux genres à priori incompatibles que réside la force du film. L'enquête est complexe et longue à aboutir, mais le rythme ne faiblit jamais, relancé par quelques scènes d'action (une course poursuite auto-moto un peu longuette mais fort sympathique) et des regains de tension parfaitement distillés. 
L'intrigue tournant autour de la prostitution adolescente, on navigue en eau trouble mais, si Dallamano ne dédaigne pas déshabiller quelques unes de ses jeunes actrices, il évite habilement la complaisance en adoptant la suggestion aux moments-clés du film. Ainsi, la séquence où policier et procureur écoutent les bandes enregistrées des rendez-vous avec les clients rappelle le climat oppressant de La Femme flic de Boisset sur un thème similaire. 

Évitant quelques clichés du genre (flic en surhomme, happy end...) tout en en préservant l'esthétique et les bons côtés (superbe partition entêtante de Stelvio Cipriani), La Lame infernale tient son rythme enlevé de bout en bout et bénéficie d'une interprétation sans faille, ce qui suffirait déjà à en faire une exception dans sa catégorie.

Le DVD :
M'étant porté acquéreur de l'édition simple, pas d'avis sur les bonus, mais saluons déjà le beau travail d'édition proposant ici une jaquette réversible (un côté rouge, très années 80, et un côté jaune en hommage à la collection de romans policiers des sixties qui donna son nom au giallo) avec, en option, une affiche du film dessinée spécialement pour l'éditeur. Le DVD contient la bande annonce de La Lame infernale, plus celles des deux titres à venir : Torso et La Guerre des gangs (Contraband). 
Proposé en version française et en v.o. sous-titrée, le master est tiré d'une copie en très bon état, même si la compression est parfois un peu juste, notamment sur les extérieurs lumineux. A part ce détail, restitué dans son format Scope d'origine, ce premier titre augure magnifiquement d'une nouvelle collection dont nous allons suivre les sorties avec toute l'attention qu'elles méritent.

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